Seulement s'ils sont devenus dominants, comme le laisse entendre une étude menée sur des rongeurs, montrant combien les effets reproductifs du stress subi pendant l'adolescence sont contrecarrés par ceux du statut social.
Les rates ont tendance à se détourner des rats ayant été stressés durant leur adolescence s'ils sont devenus socialement soumis. Par contre, si les mâles ont réagi au stress en acquérant un statut social élevé, les femelles se jetteront à leurs pattes. Voici grosso modo l'une des conclusions d'une étude menée par l'équipe de Nicole Cameron, chercheuse en neurosciences comportementales à l'université de Binghamton. Selon la scientifique, ces résultats pourraient contribuer à mieux comprendre les effets du stress social sur la reproduction humaine, notamment parce que des observations similaires ont d'ores et déjà été faites sur de nombreuses espèces.
«Beaucoup de gens n'arrivent pas à avoir des enfants», explique Cameron, «il est possible que des stresseurs environnementaux soient l'une des variables influençant la fécondité humaine». Selon la chercheuse, son travail est translationnel et est susceptible d'éclairer «les fonctions de l'axe reproductif des mammifères, y compris des humains».
Dans cette nouvelle recherche, qui sera publiée dans le numéro de mars de la revue Hormones and Behavior, Cameron et ses collègues ont voulu tester l'hypothèse suivante: un stress subi à l'adolescence altère l'attractivité des rats mâles aux yeux des femelles, mais un statut de dominant permet de corriger le tir. Dans ce sens, les chercheurs prédisaient que les femelles allaient passer davantage de temps avec les rats «normaux» qu'avec les «stressés», et que ce biais serait d'autant plus accentué chez les mâles stressés au statut social médiocre.
Ce que confirment partiellement leurs observations.
«Ce que nous avons trouvé, c'est que parmi les animaux dominants, ceux qui avaient été stressés durant leur adolescence étaient davantage sexuellement privilégiés par les femelles», précise Cameron. «Par contre, au sein des animaux subordonnés, ceux qui avaient été stressés n'étaient absolument pas favorisés. Ce qui indique que non seulement la femelle serait capable de sélectionner des partenaires en fonction des stresseurs sociaux qu'ils ont connus durant leur adolescence, mais qu'elle pourrait faire la différence entre un animal soumis et un dominant, et qu'elle choisira le second».
Fondamentalement, selon la chercheuse, une rate est capable d'identifier quels sont les animaux dominants et ceux qui ont été stressés durant leur adolescence, et la femelle préférera celui qui a le mieux réagi aux stress —c'est-à-dire en devenant le phénix des hôtes de sa cage. Preuve supplémentaire que le statut social est réellement susceptible de déterminer qui réussira à se reproduire et qui restera sur le carreau. Et que le stress laisse des marques à long-terme sur les individus, d'autant plus visibles quand vous avez des gamètes à féconder.
Slate