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Conseils, science, sante et bien-être


A l'école de ces élèves... qui ne supportent pas l'école

Publié par MaRichesse.Com sur 30 Septembre 2016, 07:12am

Catégories : #ECOLE, #INSOLITE

A l'école de ces élèves... qui ne supportent pas l'école

En France, 1 % des élèves souffrent de phobie scolaire. Pour eux, une école pas comme les autres existe depuis 2010 au Pecq (Yvelines). Vu le succès, un deuxième établissement va voir le jour à Paris.

Casquette vissée sur ses longs cheveux, chemise molletonnée, jean déchiré : une silhouette à la mode se découpe devant la porte vitrée du cours de Charles Victoire. « Je suis désolée, je suis en retard », dit doucement Salomé. C'est la première fois qu'elle vient en classe de français depuis la rentrée, et elle a une demi-heure de retard. Mais ici, ce n'est pas grave. Avec un sourire, l'enseignant l'invite à s'asseoir à côté de quatre autres ados, devant un texte de Voltaire et une méthodologie du commentaire composé. Bienvenue dans la classe de 1re du Cours singulier.

 

Cette école aux locaux exigus accueille depuis 2010 au Pecq (Yvelines), dans une banlieue chic de l'Ouest parisien, une centaine d'enfants en rupture scolaire, des naufragés que l'école a rendu malades à force de stress, de harcèlement, d'inadaptation au moule. Un kaléidoscope de causes et de symptômes désignés sous le terme de phobie scolaire, et pour lequel les solutions éducatives, à côté des rendez-vous chez le psy, sont encore très peu nombreuses.

 

L'école du Pecq, qui coûte 370 € par mois, est une exception très demandée. Sa fondatrice, Dominique Dureux, veut ouvrir « d'ici deux mois » une deuxième structure, à Paris, pour répondre à la demande. Les cours (et une partie des profs) sont les mêmes que ceux des écoles privées et publiques avoisinantes : les jeunes sont tous inscrits au Cned, le Centre national d'enseignement à distance, qui leur envoie des exercices et corrige leurs devoirs. Le Cours singulier intervient en complément : pendant quatre heures par jour, de 10 heures à midi et de 13 heures à 15 heures, les jeunes travaillent en petits groupes, avec un emploi du temps cousu main, en fonction de leurs angoisses et de leur éventuel retard à rattraper. « Ils n'ont pas besoin d'autant d'heures de cours que dans le système classique  : en petits groupes, on avance bien plus vite et on finit souvent le programme avant la fin de l'année », souligne Dominique Dureux. « Ici, c'est un tête-à-tête constant avec chacun », renchérit Charles Victoire, le professeur de français. Avec ses élèves, il cultive l'empathie et la proximité : dans son cours, tout le monde se tutoie, et les remarques désobligeantes sont bannies. Il sait que, pour ses élèves, passer le seuil de la classe est l'équivalent, en stress, d'un saut dans le vide. Il faut que ça se passe bien pour qu'ils reviennent demain.

 

 
 

 

 

Nicolas Georges, qui assure l'atelier de théâtre et participe à l'administration, est aussi le père d'un jeune phobique. Pour lui, la prise de conscience du malaise de son fils a été brutale comme un coup de fil. « Ce sont les pompiers qui m'ont appelé, deux jours après la rentrée de 4e, pour m'avertir qu'ils hospitalisaient Fabian. Il a fait un burn-out au collège », explique-t-il.

 

Son fils a repris cette année, tout doucement, le chemin d'une scolarité ordinaire, à raison de quelques heures par semaine, dans le cadre d'un protocole médical validé par l'Education nationale. « Nous sommes une solution temporaire, l'objectif n'est pas du tout de couper les jeunes du système scolaire mais de les aider à y retourner », précise Dominique Dureux.

 

Maëva, 16 ans, est encore loin de la guérison. « J'aimerais beaucoup, mais je ne crois pas que je pourrai retourner dans un lycée », raconte la jeune fille, qui a passé huit mois déscolarisée, cloîtrée chez elle. « Je veux avoir mon bac, mais rien qu'à l'idée de passer les épreuves dans un établissement scolaire, je panique. »

 

LE MOT. Phobie scolaire

La phobie scolaire est « un trouble anxieux  », explique la psychologue Béatrice Copper-Royer. Elle se traduit par un refus impérieux de l'enfant, parfois violent, d'aller en classe. « C'est pour lui physiquement impossible et c'est ce que l'entourage, souvent, ne comprend pas  », relate Marie Mitterrand, de l'association Phobie scolaire*. « Une situation de harcèlement, d'injustice ou anxiogène à l'école peuvent être déclencheurs, tout comme des problèmes familiaux. La phobie scolaire peut aussi exister sans raison objective », souligne Béatrice Copper-Royer. Selon l'association Phobie scolaire, ce trouble toucherait 1 % des élèves, qui doivent être pris en charge par des médecins. Un protocole avec l'Education nationale peut adapter la scolarisation de l'enfant.

* www.phobiescolaire.org.

 

 

 

 

« Enfin, je recommence à vivre  »

Fabien, 16 ans, fréquente le Cours singulier depuis un an

 

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Cela faisait longtemps, des années, en fait, que ça n'allait plus. Mais un matin d'automne, sur le chemin du lycée, la rupture : impossible d'aller plus loin, ne serait-ce que d'un pas. Fabien s'était préparé comme tous les jours, mais son corps ne voulait plus obéir. Il ne pouvait plus passer le seuil du bahut. Cet ado de 16 ans souffre d'une phobie scolaire qui aurait pu lui coûter la vie.

 

« Je me suis scarifié, je voulais m'ouvrir les veines pour ne plus y retourner », raconte le garçon, qui revendique dans son look et son discours un profil « un peu geek », différent. Il vénère les jeux vidéo, aime le film « le Fabuleux Destin d'Amélie Poulain », n'a pas de goût pour le rap et, pour cela, il était « le PD, le connard » dans la jungle adolescente de son collège, à Sartrouville (Yvelines). Suivi pour ce qui a été diagnostiqué comme une dépression et une phobie scolaire, Fabien a été orienté par sa psy vers le Cours singulier, qu'il fréquente maintenant depuis un an, avec enfin le plaisir d'y retrouver d'autres jeunes et une vie sociale.

 

Harcelés ou Isolés jusqu'à la déprime

 

Si le harcèlement n'est pas une histoire partagée par tous les élèves de l'école, il est pour beaucoup un déclencheur sinon la cause d'un malaise qui s'installe petit à petit. Gaspard, assis pas loin de Fabien pendant le cours de français, s'était « vite spécialisé dans la répartie méchante », explique-t-il, pour ne pas être embêté au collège par les autres. Reste que ce jeune, scolairement très en avance, ne s'est pas fondu dans le moule et s'est isolé jusqu'à la déprime.

 

Au Cours Singulier, « on se comprend et, les jours où l'un ne va pas bien, on le ressent tous, ce qui peut plomber l'ambiance, d'ailleurs », relève une jeune fille qui préfère taire son prénom.

 

Fabien, dans cet environnement, a vécu une deuxième naissance. « Enfin, je recommence à vivre. » Il suit le programme de 1re S, veut passer le bac l'an prochain. La suite, il en rêve et compte la vivre : s'envoler pour le Canada et travailler « dans un studio de jeux vidéo ».

  Le Parisien

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