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Conseils, science, sante et bien-être


Et si l'Afrique refusait le développement ?

Publié par MaRichesse.Com sur 10 Décembre 2015, 00:07am

Catégories : #AFRIQUE, #MORT, #VIE

Et si l'Afrique refusait le développement ?

Dans son ouvrage ‘‘L’Afrique est mon combat’’ paru en 2009 aux Edition L’Archipel, Bruno Amoussou nous offre, à la page 12, ses lignes qui donnent à penser que son sourire s’est fait grinçant tout en restant fidèle à son trait distinctif, l’ironie. 

Lisons ces lignes : ‘‘Le culte des morts est si bien ancré dans nos mœurs que chaque séance du Conseil des ministres débute par l’observation d’une minute de silence à la mémoire des personnalités disparues ou de leurs proches. Membre du gouvernement, j’ai tenté d’y mettre fin. En vain. Avec le temps, ce culte a connu ses travers et a engendré une industrie mortuaire qui occupe une place importante dans notre économie. En vivent les gestionnaires de morgues et de corbillards, les usines textiles, les importateurs et distributeurs de tissus, les couturières, les coiffeuses, les producteurs et les distributeurs de boissons alcoolisées ou non, les ateliers de barres de glace, les transporteurs de marchandises et de personnes, les loueurs d’appareils de sonorisation, les reporters vidéo, les photographes, les fanfares, les orchestres de musique moderne et traditionnelle, les gestionnaires de bâches, les traiteurs, les tenanciers de débits de boissons. Ainsi se sont établies de véritables entreprises de pompes funèbres dont le slogan publicitaire pourrait être : laissez de substantielles économies et mourez en paix ! Au Bénin comme dans certains pays africains, il est plus cher de quitter ce monde que d’y entrer’’.

Voilà ce qu’écrit, presque sarcastiquement, Bruno Amoussou. On regrettera que sa liste ne se soit pas terminée par etc. Elle est en effet loin d’être exhaustive. Il manque, par exemple, ceux qui peuvent désormais implanter la morgue à domicile dans n’importe quel village, fût-il sans électricité, sous forme d’un féerique quadrilatère de verre appelé ‘‘baie vitrée’’, à l’intérieur duquel la température créée est celle de l’hiver canadien ou à peu près (dans nos cultures où la paix se dit fraîcheur, on s’arrange pour que le mort bénéficie de la ‘‘fraîcheur éternelle’’ déjà sous nos yeux) ; il y a aussi les mairies, les préfectures, les chefs de quartier, payés pour autoriser que les rues et ruelles soient illégalement fermées à la circulation et transformées, parfois toute une semaine, en vastes restaurants pour repas funéraires festifs et plantureux. Et quelles entrées budgétaires feraient télévision radio nationales sans les annonces nécrologiques ? A quelles intentions les prêtres catholiques toucheraient-ils honoraires et feraient-ils quête s’il n’y avait pas les commémorations des morts d’il y a un siècle, un demi-siècle, un quart de siècle ? Et ne faudrait-il pas mentionner également la grande modernité apportée par les ‘‘camions frigorifiques’’ comme pour faire pendant à la ‘‘baie vitrée’’ ? Ces immenses services traiteurs roulants sont devenus le nec plus ultra de celui qui veut montrer qu’il a de la classe et que celui qu’on a enterré à l’instant ou il y a cinquante ans lui est cher et avait peut-être aussi de la classe. Et les gardiens ‘‘suntrev’’ recrutés pour veiller à tout ? Et comment oublier les incontournables ‘‘faiseurs de pluie’’ qui pourraient gâcher la fête en provoquant sur les lieux une pluie impromptue ? Il faut les ‘‘intéresser’’, c’est-à-dire les payer pour qu’ils empêchent le ciel de pleurer, etc., etc. Entre parenthèse, on signalera qu’en cas d’inondation ou de sécheresse graves, ces ‘‘faiseurs et défaiseurs de pluie’’ disparaissent au profit de ce que Axelle Kabou appelle ‘‘l’espoir d’une intervention étrangère’’ dans son livre célèbre ‘‘Et si l’Afrique refusait le développement ?’’ Nos gens de pluie et de non pluie ne sont performants que pour démontrer leur puissance, c’est-à-dire leur nuisance. Puissance prédatrice. Puissance de mort dans le cadre ancestral de l’ ‘‘industrie mortuaire’’ d’un Bénin qui s’acharne, lui aussi, à refuser le développement. La parenthèse fermée, disons que la question de l’exhaustivité de la liste de Bruno Amoussou devient parfaitement dérisoire, superfétatoire, eu égard à ‘‘la vérité, l’âpre vérité’’ que son texte livre sur une mentalité dégradée et décadente, rongée par le refus du développement et qui fait son choux gras des morts et de la mort. Le gouvernement, la religion, les média, tout le peuple en vit, et nul ne semble s’apercevoir que le pays en meurt. 

 Roger Gbegnonvi
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