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Les femmes parlementaires sont-elles plus honnêtes que les hommes?

Publié par MaRichesse.Com sur 23 Octobre 2014, 01:46am

Catégories : #RELATIONS, #POLITIQUE, #ARGENT, #NEWS

Les femmes parlementaires sont-elles plus honnêtes que les hommes?

60 parlementaires sont dans le viseur du fisc, d'après le Canard enchaîné paru ce mercredi 22 octobre. Et parmi ce groupe… aucune élue: «Une certitude pour l'instant: aucune femme ne figure parmi les "nouveaux Thévenoud"», écrit l'hebdomadaire satirique.

Certes les femmes ne représentent qu'un quart des parlementaires (155 députées sur 577 et 87 sénatrices sur 348). Mais une simple règle de trois nous montre qu'on devrait trouver au moins une quinzaines de femmes politiques parmi les 60 personnes visées, si l'information du Canard enchaîné est vraie. Pourquoi n'y-en-a-t-il pas? Les femmes politiques sont-elles plus honnêtes que leurs collègues hommes?

Commençons par une mise au point: les femmes ne sont pas «par essence» plus honnêtes que les hommes. Si elles le sont une fois au pouvoir, c’est en vertu d’un contexte et d’une histoire. Il y a d’ailleurs eu récemment des exemples de femmes politiques impliquées dans des affaires de fraude ou de corruption, comme la députée Sylvie Andrieux,récemment condamnée en appel pour détournement de fonds publics, ou la première adjointe au maire de Levallois-Perret Isabelle Balkany, poursuivie avec son mari pour blanchiment de fraude fiscale.

 

Les Françaises plus exigeantes que les Français

Les femmes politiques sont donc loin d’être toutes des modèle de droiture. Pour autant, les recherches sur le sujet tendent à montrer qu’elles sont plutôt plus honnêtes que les hommes dans certains contextes.

Quand on compare les politiques de différents pays, on observe ainsi une corrélation négative entre participation des femmes au pouvoir et corruption politique. Partant du postulat que les femmes au pouvoir seraient plus honnêtes que les hommes, des expériences ont été menées dans des villes comme Mexico et Lima, où des femmes ont été recrutées dans les services de police et dans le contrôle du trafic routier. Dans les deux cas, une baisse significative de la corruption a été observée.

 

Sans que l'on puisse forcément tracer un lien direct de causalité, les femmes politiques françaises seraient peut-être à l’image des Françaises en général, qui sont plus exigeantes sur les questions de moralité et de corruption que leurs homologues masculins. 82 % des femmes pensent qu’il y a «beaucoup ou assez de corruption au gouvernement», contre 73% des hommes. Elles sont aussi légèrement plus nombreuses à affirmer que «pour être un bon citoyen, il est important de respecter les lois» (75% contre 69%) ou de payer ses impôts (62% contre 56%), selon une recherche menée par Mariette Sineau, directrice de recherche CNRS au Cevipof, dans un ouvrage collectif intitulé Favoritisme et corruption à la française (2010).

 

Des discriminations qui poussent à être plus prudentes

Si les femmes aspirent à plus de probité et sont aujourd’hui plutôt plus enclines à en faire preuve dans certains contextes, encore faut-il ne pas se tromper sur les raisons. Il n’existe aujourd’hui aucun consensus au sein de la recherche pour faire état de différences «structurelles», génétiques ou biologiques, entre les deux sexes quant à leur honnêteté. Au contraire, beaucoup de chercheurs ont mis en avant des explications historiques ou sociologiques.

Une première analyse des chercheuses Justin Esaray et Gina Chirillo, de la Rice University, relie le légalisme dont les élues font preuve aux discriminations qu’elles subissent. Dans les sociétés où la corruption ou les activités illégales sont punies, s’y adonner pourrait représenter un risque supérieur pour les femmes en raisons de représailles plus fortes si elles étaient découvertes, précisément parce qu’elles sont discriminées. Alors qu’en Inde, en Indonésie ou à Singapour, les femmes ne font pas preuve de plus de probité, c’est le cas en Australie, selon les chercheuses, qui analysent les résultats d’une expérience menée dans quatre pays différents, parce que les femmes sont«plus susceptibles d’être punies en cas de violation de la norme».

Sans parler de risque, Mariette Sineau évoque aussi une «défiance plus fréquente vis-à-vis du personnel et des institutions politiques chez les femmes, qui ont le sentiment d’être mal représentées», suggérant elle aussi un lien de cause à effet entre le sentiment d’être discriminé et une plus grande exigence éthique:

«Tout se passe comme si la plus grande sévérité des femmes vis-à-vis de la corruption témoignait en creux de leur plus grande défiance à l’égard des acteurs du système politique, et surtout du sentiment d’être mal représentées.»

 

Plus on est élu depuis longtemps, plus on transgresse

Outre ce sentiment de discrimination, la vie quotidienne pourrait aussi jouer un rôle. La division des tâches s’opère toujours en laissant, la plupart du temps, le soin des enfants aux femmes. Elles sont ainsi en contact plus longtemps que les hommes avec l’école, lieu de l’apprentissage de la norme par excellence, suggère Pierre Lascoumes, directeur de recherche au Centre d’études européennes (CEE) de Sciences Po:

«Les femmes ont un rapport plus direct aux normes communes à travers l’éducation des enfants, notamment. Le propre de ceux qui s'exonèrent de ces règles, c’est un autre rapport au monde.»

Enfin, parmi les explications régulièrement avancées, on relève leur entrée plus tardive en politique et leur moindre professionnalisation dans ce domaine. «Moins de femmes font des carrières longues en politique», avance Pierre Lascoumes[1]. Or, la professionnalisation est un facteur explicatif important de la corruption. Plus on reste longtemps en politique, plus on aura tendance à transgresser les règles et à se dire qu’il «faut en passer par là» pour réussir. «Les plus grosses affaires d’abus de biens sociaux, de corruption ou de fraude fiscale sont généralement le fait d’hommes ancrés depuis longtemps en politique», fait remarquer le chercheur. Au contraire, les femmes qui ont fait des carrières longues en politique, comme Simone Veil, sont plutôt rares. «Les hommes sont plus familiers des règles» et donc moins gênés pour les transgresser, estime de son côté Mariette Sineau.

Les femmes ne sont donc pas par nature «plus honnêtes», mais elles le sont devenues, pour parodier la célèbre expression de Simone de Beauvoir. Elles n’ont d’ailleurs pas besoin de se présenter comme intrinsèquement différentes ou meilleures que les hommes pour accéder à plus de liberté, sans quoi le piège essentialiste risquerait fort de se retourner contre elles. 

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